Éditos de l’Association
Considérations sur l’attaque du 7 octobre et ses conséquences
Paul Ricœur est à l’origine de la notion de « consensus conflictuel » : pour lui, le partage d’un socle de règles est un préalable indispensable à l’expression de désaccords en démocratie. Dans cet état d’esprit, l’Association Paul Ricœur s’est penchée, fin 2022, sur le débat public autour de la fin de vie tel qu’il se mettait alors en place, trois mois seulement après qu’Emmanuel Macron avait annoncé la mise en place d’une Convention citoyenne sur la fin de vie, ouvrant la voie à une évolution de la loi Claeys-Leonetti de 2016.
Les mots « Rouss », « Russie », « Ukraine », « Res publica des deux Nations »
Lors de sa leçon d’histoire télévisée de juin 2021, le président Vladimir Poutine avait préparé les esprits à sa future opération spéciale en démontrant qu’Ukrainiens et Russes ne font qu’un seul peuple, que la langue et la culture ukrainienne n’existent que comme une variante provinciale de la culture et de la langue russes. Et comme on ne fait pas la guerre contre soi, l’opération militaire pour reprendre la main sur l’Ukraine ne pouvait pas être baptisée « guerre ». C’était le retour de l’Ukraine au bercail. Les questions de mots sont ici fondamentales, surtout quand un pays souffre, comme j’ai voulu montrer dans mes Sites de la mémoire russe, d’une hypermnésie généralisée doublée d’une amnésie profonde. Et les appellations « Rus’ », « Rossia », « Ukraina » méritent qu’on les explore à fond.
Fin de de vie ou abolition de la souffrance ?
À la demande de l’Association et dans le sillage de sa participation à notre débat sur la fin de vie en janvier 2023, Michaël Foessel, professeur de philosophie à l'École polytechnique, nous livre ses réflexions sur ce thème d’actualité. Ci-dessous un extrait d’un article à paraître prochainement dans la revue Esprit.
Retour sur la réforme des retraites
Pendant trois mois, de la mi-janvier à la mi-avril, le pays a connu un conflit social sans précédent, autour du projet de réforme des retraites proposé par le gouvernement. Beaucoup a été dit, et dans plusieurs directions sur ce conflit. Si on se permet d’y revenir, c’est parce que certaines questions fondamentales concernant notre modèle social, nos institutions et la méthode de gouvernement y ont été à l’œuvre.
La démocratie face à la violence
M’accordant avec le texte de Joël Roman sur la réforme des retraites, une loi passée en force contre une large majorité de l’opinion car elle ne pouvait pas s’appuyer sur le critère de l’âge en raison même de la diversité des situations, je me propose de mettre en scène, non sans faire écho à la pensée politique de Paul Ricœur, des interrogations portant sur le devenir historique de la démocratie en France et en Europe. Dans cette optique, je privilégierai, dans le contexte hexagonal fort troublé et inquiétant qui va de l’élection présidentielle de 2017 aux émeutes urbaines de juin 2023 en passant par la deuxième élection présidentielle de 2022, une constellation de problèmes : ceux-ci portent sur la violence, sur la politique considérée comme « la sphère des sphères » de l’agir, dans la mesure où cette superstructure n’est pas réductible aux infrastructures économiques, mais aussi sur la démocratie d’opinion et sur l’Europe.
L’ordre anti-terroriste et ses paradoxes
En ces temps de guerre en Europe, il n’est pas inutile d’examiner la place centrale qui est donnée au terrorisme dans la prise en considération de la violence qui se propage aux diverses échelles territoriales. Ce terme utilisé à tout bout de champ, instrumentalisé à tort et à travers, permet en effet de comprendre beaucoup des transformations en cours à l’échelle nationale ou mondiale.
La guerre du Kremlin et ses conséquences pour les Ukrainiens, les Russes et les Européens
À la suite de son Assemblée générale, le 29 septembre dernier, l’Association Paul Ricœur accueillait la politologue Marie Mendras, chercheuse au CNRS et au CERI-Sciences Po, spécialiste de la Russie post-soviétique. L’occasion, quelques sept mois après son déclenchement, de tirer de premiers enseignements de la guerre en Ukraine.
Narrativité idéologique
« La transition écologique en manque de récit », titre l’éditorial du Monde des 23-24 octobre derniers. La référence à la mise en récit comme adjuvant, voire substitut, à l’argumentation est en effet devenue récurrente dans la rhétorique politique, médiatique, managériale ou encore publicitaire.
Le spectre de la dissolution
La situation politique que connaît notre pays, depuis les élections législatives de juin 2022, sans être totalement inédite (déjà en 1988, le gouvernement de Michel Rocard ne disposait que d’une majorité relative), est toutefois singulière : en effet, en n’accordant pas la majorité absolue à la coalition présidentielle, le corps électoral s’est affranchi de la règle tacite qui avait justifié, lors du passage au quinquennat, l’inversion du calendrier électoral et placé les élections législatives dans la foulée de l’élection présidentielle, ce qui était censé assurer une majorité automatique au président élu.
Quel retour du politique ?
Les événements inquiétants qui se succèdent rapidement – Covid, guerre en Ukraine, dérèglement climatique… – ne sont pas sans agir sur une opinion publique inquiète et désorientée. Pourtant, l’emporte discrètement en cette rentrée 2022 l’idée de sobriété qui, ayant des résonances multiples dans les divers domaines de la vie en société, laisse entrevoir des avancées plus rapides que prévu en faveur de la transition énergétique ou climatique.